Chapitre 1 : Le Dorthkhel Svirrik

Ses doigts avaient martelés sa théière, au rythme de la chanson en l'honneur de la barde Diladi. Son rire avait répondu en écho à celui de la communauté à travers les galeries de BoisGrévier. Son expression, avenante et chaleureuse, avait soutenu le regard de chacun des autres participants du Dorthkhel Svirrik.

Et pourtant, sous le couvert de la joie et de la festivité ambiantes, Myree camouflait un profond sérieux. A l'instar de ses camarades, une concentration intense aiguillait les pensées de la Barde vis-à-vis du début du rite. Que ce soit vis-à-vis des anciens - analysant paroles, gestes, expressions de ces visages plus ou moins ridés - mais aussi des participants.

Par exemple, après avoir accepté le gâteau sec tendu par Lilci dans un grand sourire, la Gnome n'avait pas hésité une seconde, une fois le dos de l'intéressée tourné, à se délester de cette pâtisserie en la glissant dans le museau de son blaireau de compagnie. Excès de méfiance, ou simple aigreur ? Sans doute était-ce davantage la deuxième option.

Durant la traversée, si ses gestes donnaient l'impression d'être focalisés à faire chanter son instrument fétiche, ses yeux, quant à eux, n'avaient cessé d'épier ses trois camarades, non sans une certaine suffisance.

Elle, qui avait l'habitude de côtoyer ce genre de passages étroits au quotidien, était presque amusée de constater la curiosité et la fascination dont Wrenn faisait preuve à l'égard des parois rocheuses et des outils abandonnés rencontrés sur leur chemin.

La rigueur quasi immédiate que Glimble avait révélé en commençant à dessiner une carte, alors qu'aucune épreuve n'avait encore commencé et que la foule d'anciens étaient encore amassés au fond du couloir, tira presque un fou rire moqueur de la part de Myree.

Quant au mutisme de Lilci, la jeune Barde le nota, non sans une pointe de pensées fourbes à ce sujet.

Myree demeura silencieuse et observatrice face au dilemme des potions, s'amusant de constater les échanges entre ses trois comparses et d'en déceler les émotions de chacun et chacune. Au moindre regard porté dans sa direction, la Gnome se contentait d'un grand sourire encourageant, bras croisés, ne cherchant visiblement pas à se mouiller en buvant la première le contenu des fioles tendues par Mavheran.

Une fois les trois gnomes rapetissés jusqu'à atteindre la taille de pommes de pin, Myree accepta à son tour la flasque tendue par la cheffe du clan. Cependant, plutôt que de porter directement son contenu sur ses lèvres, Myree aiguilla un regard malicieux vers les trois petites silhouettes situées à ses pieds. Se penchant au-dessus d'elles, Myree tendit un index, pour toucher doucement le haut du crâne de l'un des trois Gnomes - Glimble, en l'occurence - tel un enfant s'amusant à tapoter un insecte trouvé par terre.

- Vous savez les amis... Je comprends qu'après ces discours, vous vouliez vous faire tout petits. Mais il y avait peut-être des moyens moins drastiques d'y arriver, vous ne pensez pas ? Allez, je vous taquine ! Je vous rejoins tout de suite !

Et dans un rire cristallin, la Gnome se redressa, puis porta un regard déterminé en direction du reste de la population de BoisGrévier, à qui elle s'adressa sur un ton de plaisanterie :

- Je sais qu'on a moins l'habitude d'entendre ce conseil, nous les Gnomes. Mais pour une fois : regardez bien là où vous mettez les pieds, dans les jours qui viennent ! On est censé finir adultes dans cette histoire, pas en purée !

Et sans perdre plus de temps, Myree but à son tour le contenu de la potion, jusqu'à arborer progressivement une taille similaire à celle de ses camarades. A cette occasion, elle eut un sourire adressé à Lilci, lui donnant un coup d'épaule amical, dans une exclamation encourageante :

- T'as vu, c'était pas si terrible !

Puis, après une pause de réflexion, ajouta avec entrain :

- ... Par contre, je croise les doigts, on m'a déjà dit qu'il y avait des effets secondaires à ce type de potions. Nausées, déshydratations, hallucinations, constipations, sans parler des rares cas où certaines personnes ne retrouvaient pas la véritable taille de certains de leurs membres ! J'ai déjà vu un gars qui avait un tout petit bras après une expérience similaire. Expérons que ça nous arrive pas !

Le courage de Wrenn ne surprit sans doute aucun de ses compagnons : d’une main assurée il se saisit de la fiole et, après leur avoir adressé un clin d’œil complice, en avala une gorgée. D’un geste preste, Halvena reprit la potion avant que son effet ne se fasse sentir. Le liquide, d’un goût âpre rappelant certaines baies cueillies trop tôt, pétillait en bouche. Sous les yeux rieurs de la doyenne et les « oh » et « ah » amusés du public, le jeune Pied-Léger rapetissa tel un champignon jeté au feu, jusqu’à ne s’élever qu’à peine plus haut que le genou de Mavheran.

Il en alla de même pour Glimble, qui faillit renverser son encrier dans la précipitation, puis pour Lilci, que la cheffe de clan rassura d’un sourire doux, tiède comme le miel. Myree, elle, avait semblé plus hésitante. Était-ce l’ironie de retourner à taille d’enfant le jour même où on la reconnaîtrait adulte qui la freinait ? Ou bien n’avait-elle tout simplement pas soif, après le grand thé avalé ce matin ? La rusée avait simplement attendu son heure pour mieux taquiner ses compagnons et, d'un ultime trait d'esprit, amuser l'assemblée. Sa rasade ingurgitée, elle se retrouva comme ses pairs à lever le menton pour contempler leurs aînées.

Mavheran Haerlskeel

- Mes chers petits ! Comme vous voilà beaux, s’amusa Mahveran, déclenchant des rires attendris dans l’assemblée. D’un regard, Glimble constata que son père avait la larme à l’œil, tandis que sa sœur goguenarde lui tendait un mouchoir. La mère de Wrenn, l’air plus fier que sentimental, gardait les mains jointes sur le cœur, le caressant du regard. Halvena se pencha alors vers la cheffe du clan et lui souffla quelques mots à l’oreille. Le sérieux revint aussitôt sur le visage de Mahveran. - Mais où avais-je la tête ! Le temps presse, jeunes gens. Du nerf ! Elle désigna une ouverture entre deux pierres, une brèche étroite dans l’éboulis. Par ici. Il faudra ramper un peu, j’en ai peur Dame Poêledacier… Une robe blanche, quelle idée… Et escalader parfois aussi. Oh, de la petite escalade enfin, n’ayez crainte La Taupe. Allez, allez ! Vous ne resterez pas minuscules bien longtemps. -------------------- Mavheran Haerlskeel a l’autorité tranquille de ceux que l’on écoute sans discuter : son regard ferme et sa voix claire portent à la fois la sagesse du clan et l’étincelle joyeuse des gnomes.

Mieux valait ne pas songer à ce qui leur arriverait s’ils reprenaient taille gnomesque avant d’avoir fini la traversée…

Les jeunes gens s’engouffrèrent donc au pas de course dans l’ouverture, abrupte et sombre. Comme dans les contes du vieil Alrik ou de Perim Folmelodie, le rite de passage de Boisgrévier plaçait une frontière entre deux mondes. Myree, Wrenn, Lilci et Glimble franchiraient l’éboulis comme on franchit l’enfance : ils quittaient la communauté pour mieux y revenir.

A la lueur tremblante d’une bougie allumée par Wrenn, aguerri aux explorations souterraines, le quatuor se faufila entre les aspérités rocheuses. La progression se fit lente et laborieuse : le chemin n’était pas balisé, et il leur fallut plusieurs fois revenir sur leurs pas après s’être fourvoyés entre deux pierres. Ils grimpèrent, glissèrent, roulèrent ; ils durent baisser la tête, étirer les bras, plier les genoux ; ils soufflèrent, pestèrent, et les moins athlétiques geignirent peut-être. Enfin, après maintes contorsions, une mince clarté perça l’ombre.

Ils débouchèrent dans un tunnel plus large, baigné de la lumière verte et familière d’une lanterne à mousse phosphorescente. Les parois, moins régulières, dessinaient des reliefs tourmentés, sculptés par la pioche à mesure qu’elle suivait les caprices des veines minérales. Face à eux se dressaient cinq stèles de calcaire clair, couvertes de gravures tantôt sinueuses et raffinées, tantôt abruptes et grossières :

Cliquez ici pour dérouler le parchemin...

Mvet'fhivet'zvtowuiwa dvet' cvet' ktobtold wahi vhivet'wuix.

    

.


Chzacwuin wazahit .

Au-delà, la galerie paraissait curieusement se fondre dans une paroi lisse et sombre. Mais en s’approchant, les jeunes gnomes discernèrent l’illusion : un cercle de runes mouvantes y brillait, étincelant d’une clarté bleutée. Elles se réarrangeaient sans cesse, dessinant un anneau imparfait, comme si la pierre riait de ses propres malices. Le tunnel se poursuivait derrière, à coup sûr.

Glimble, versé dans les arcanes, reconnut là un glyphe : il leur faudrait trouver la touche finale pour en percer le secret.

Vos personnages reprennent leur taille d'origine quelques minutes après être sortis de l'éboulis, en suivant l'ordre dans lequel ils ont bu la potion. Ils ne peuvent bien déchiffrer les stèles qu'à hauteur de gnome.

Glimble avait rattrapé son encrier de justesse, surpris par les brusques effets de la potion. Il n'avait rendu qu'un sourire distrait à son père, le voyant tant ému (mais sans trop le comprendre).
Une fois haut comme trois pommes, il avait déjà recommencé à prendre des notes qu'ils furent pressés par les aînés de s’engouffrer sous l'éboulis.
Il commença alors à cheminer, son matériel à la main, et trébucha quelques fois, tentant jusqu'au bout de prendre des notes au fil de leur périple.
Il finit par se rendre compte qu'il n'avait finalement pas trop de ses deux mains et de son œil pour continuer sa progression. Il rangea ainsi ses affaires à contre-cœur et grommelant, alors que la pipistrelle lâchait l'équivalent d'un "tss" entendu.
Alors, aidé de son bâton de marche d'une part, et prévenu ça et là de reliefs et obstacles impromptus par Sérotine, il termina tant bien que mal sa progression.

Arrivés dans la "grande" caverne, qu'il reprit sa forme à la suite de Wrenn, il retrouva ses notes et entreprît de rattraper son retard.
Découvrant à la lueur tamisée de la lampe moussue, amplifiée par la vision gnomique, les antiques stelles, il resta bouche-bée quelques instants.
- Par la cape de Baervan, qu'est-ce donc que cela ?

Il laissa glisser ses doigts sur la pierre ciselée, comme pour mieux appréhender les écritures. Il ne les lisait pas toutes, et se concentra pour tenter au moins d'identifier l'idiome de celles qu'il ne connaissait pas.
Il prît le temps de les recopier dans son carnet de son écriture rapide du mieux qu'il pût, mais comprenant tant de pattes de mouches qu'elle eut vite fait de perdre qui n'avait pas l'habitude de le lire (c'est à dire pas grand monde à part lui-même, Halvena, et peut-être sa sœur).

- Camarades, jetez-donc un œil à cela : il y a là plusieurs idiomes, que je ne connais malheureusement pas. Il semble y avoir quatre stèles comprenant chacune une phrase d'un idiome particulier. La cinquième comporte, elle, les quatre idiomes ensemble. Mais les textes diffèrent d'avec les autres stèles.
Que lisez-vous ?


Puis, sans vraiment laisser le temps à ses congénères de réfléchir, il s'éloigna prendre des notes sur ce qu'il avait identifié comme un glyphe.
Il marmonna, plus pour lui-même qu'autre chose :
- Tiens ? Une... illusion... Mais pas que. Un glyphe ?

Il posa sa paume droite sur son œil valide et marmonna quelques paroles incompréhensibles. Lorsqu'il retira sa main, son œil semblait comme luire faiblement d'une aura turquoise, et il commença à étudier, de cet œil magiquement averti, les arcanes allant et venant autour et au travers de l'illusion.
- .

Glimble lance Détection de la magie et tente l'identification du glyphe.

- Arrête Myree ce n’est pas drôle.

Lilci, connaissait la malice de la gnome et bien qu’elle apprécie toujours de bonne blague, elle avait toujours eu du mal avec l’aisance de la barde. Toujours a s’agiter, a être pleine d’entrain, à attirer l’attention sans montrer qu’elle prenait un toi soit peu quelque chose vraiment au sérieux.
Bien qu’elle n’avait jamais entendu de tel effet secondaire après avoir ingurgiter une potion, on pouvait voir dans le regard de la jeune commis de la Lanterne Verdi que les taquinerie de sa camarade généraient des doutes dans son esprit. Mais il était trop tard pour renoncer, la potion avait déjà fait son effet et maintenant ils étaient invités à crapahuter à travers l’éboulis.

Dame Mavheran avait raison, elle avait été stupide de mettre sa belle robe blanche. Sur le moment elle avait pourtant trouvé l’idée parfaite. C’était sa plus belle robe en plus. Doublée avec une dentelle qui dépassée légèrement en fin de coupe, manche longue au trois quarts et un décolleté très discret, qui sous son armure, dessiné merveilleusement ses courbes féminines de demoiselle. Ses chausses en cuir brun contrastés avec la délicatesse du vêtement d’un blanc pur, mais elle était là à l’aise et plutôt jolie. Enfin, avant de commencer à ramper dans la cavité.

Au beau milieu du parcourt, elle s’inquiéta d’avoir due laisser Miélo, son animal de compagnie, derrière elle. Il avait son nécessaire de cuisine avec lui… Mince ! L’idée de l’alléger de ce sac, venait de lui faire perdre ce nécessaire qu’elle chérissait temps. L’animal avait un bon instinct et un lien unique les unissait, elle garda espoir, peut-être que le blaireau ferait appel a ses dons naturels pour trouver un autre chemin jusqu’à elle.

Malgré le poids et les contraintes de mouvement que lui imposait son armure, comparé à l’accoutrement plus souple, dira t’on, de ses trois autres partenaires, Lilci avait une bonne condition physique et elle suiva sans mal le rythme que Wrenn maintenait en tête de file. Plus Soucieuse que les autres peut-être, elle essayait tant bien que mal de limiter de salir sa belle robe. Ce fut néanmoins sa première contrariété lorsqu’ils reprirent leur taille normal. Elle constat un accros sur la manche gauche et des taches de poussière ici et là. Elle venait d’abimer sa belle robe. Sa moue en disait long sur ses préoccupations, alors que Gimble avait déjà analysé toute la pièce.

¤ Fiou ! Tous mes membres sont de bonne taille au moins ! ¤Eut-elle comme pensée un regard de victoire à l’encontre de Myree qui les avait taquiné plus tôt.

Lilci aimait la rigueur de son compagnon magicien. Elle trouvait juste dommage qu’il ne le mette en œuvre qu’en présence d’ouvrage ou d’arcane. Elle décida de ce pencher elles aussi sur les écritures des stèles.

- Du charabia ici…. Et là aussi ! Pas que je n’aime pas les énigmes, mais Mavheran nous a vraiment pas aidée. Ah ! Attendez voir ! Les casseroles de Roulebaril sont bien beurrer, s’exclama t’elle, alors même que ce qu’elle venait de dire n’avait ni queue ni tête. Ici, c’est de l’Halfeline. Mais, bon c’est pas plus compréhensible pour autant… Si je vous le traduit… Voyons voir.

Lilci qui avait grandit dans les cuisines de la taverne Verdi, avait eu l’occasion d’apprendre la langue de sa tenancière Hin, Euphémie Roulebaril. Elle ne maitrisé pas langue langue comme pouvait lire le gnome ou le commun, mais assez bien pour réussir à déchiffrer ses quelques mots plutôt basique.

- Alors voilà, c’est écrit ici : « Où sont vos manières ? Retirez vite votre bras de la chaise ! Leur lu t’elle a voix haute, écorchant quelque mots, suivant du doigt les écrit de la deuxième stèle. Voilà c’est tout.

Elle n’était pas plus avancé. La phrase était d’une banalité étonnante te pour être inscrite ici. Peut-être s’agissait il là d’un dialogue entre plusieurs tribu, mais à la description de la partie en Halfelin, cela lui semblait sans intérêt.
Elle haussa les épaules en regardant Myree.

- Tu as une idée ?

Wrenn ne put retenir un hoquet de surprise lorsque, quelques instants après avoir avalé la potion, il vit Mavheran devenir de plus en plus grande, au point d’être maintenant bien quatre fois plus grande que lui ! Lorsqu’il entendit derrière lui la voix (tonitruante) de Glimble et qu’il se retourna, il comprit alors que ce n’était pas tout le monde qui avait pu grandir, mais bien lui qui était devenu minuscule. Les caillasses qui trainaient par terre faisait maintenant la taille de son mollet… pour les plus petites. Il jeta un coup d’œil à la foule. Sa mère était là. Finalement, elle s’était souvenu que c’était aujourd’hui. Cette vision suffit à remplir à bloc la réserve de courage qu’il avait au fond de lui.
Rapidement rejoint par Glimble et Lilci, il fronça les sourcils et s’interposa d’instinct devant cette dernière lorsque l’énorme de doigt de Myree s’approchait dangereusement.

¤ Ne dépasse pas les bornes, Myree …¤

Il ne releva pas la pique sur les discours, en revanche, lorsqu’elle parla du gars dont le bras n’avait pas repris sa taille normale, il ne put s’empêcher de rétorquer :

- Si seulement ça pouvait arriver à ton égo ou à ta fierté, je crois que ça nous ferait tous le plus grand bien !

Puis, après avoir écouté les conseils avisés de Mavheran, il sorti de son sac une bougie et s’enfonça dans l’infructuosité. Progressant avec aisance dans le boyau qui s’enfonçait dans la roche, il se retournait régulièrement pour vérifier si tout le monde suivait, ou à chaque fois qu’il entendait Glimble trébucher, Lilcy se plaindre, ou Myree pester. A chaque intersection, il prenait méthodiquement à gauche, rebroussant chemin régulièrement, devant un cul-de-sac. Au bout d’un moment qui lui paru une éternité, il déboucha enfin dans un tunnel de taille « normale ».
Il fût le premier à reprendre sa taille, et en profita pour étudier un peu l’environnement, au-delà des 5 stèles.

Est-ce je peux faire un test de perception pour voir si je trouve quelque chose dans cette pièce qui pourrait nous aider à résoudre l’énigme ?

En se retournant vers ses amis, il fit rapidement le lien entre la moue de Lilcy et l’état de sa robe.

- Ne t’inquiète pas, j’essaierai de te la réparer, si tu veux, dit-il avoir un sourire rassurant.

Après quelle ai réussi à traduire une partie du message, en halfeline semblait-il, il considéra à son tour les stèles autour desquelles Glimble s’affairait. Au milieu des symboles inconnus pour lui, il reconnu l’ignoble langue des gobelins.

- Il y a du gobelin, ici, dit-il en pointant la première stèle. Méfiez-vous de ce kobold si vieux. Un kobold ?

- Et là, seulement deux mots, continua-t-il en montrant l'inscription sur la cinquième. Chacun sait... et je ne sais pas lire le reste de la phrase. Hum… Quelqu’un sait déchiffrer le reste ?

Suite à sa plaisanterie sur l'effet de la potion de rapetissement, si le malaise de Lilci avait eu pour effet d'accentuer le sourire malingre figurant sur les lèvres de Myree, la réponse de Wrenn avait visiblement suscité sa surprise. Ses joues s'étaient empourprées, et ses airs moqueurs dissipés. Et c'est dans une figure quelque peu boudeuse que la Gnome s'était engagée à la suite de Perce-feuille, lorsqu'il vint le moment d'entamer leur périple parmi les étroites cavités de ces profondeurs.

La Barde ne fit aucun commentaire sur le choix du Trappeur de tourner systématiquement dans la même direction à chaque intersection : il s'agissait là d'une consigne qu'on adressait à chaque mineur chargé d'explorer de nouvelles galeries, afin de pouvoir plus aisément retrouver son chemin. Et il ne faisait aucun doute qu'il s'agissait de la meilleure chose à faire en cet instant. Myree laissa bien échapper quelques grognements et jurons d'insatisfactions, en heurtant quelques parois du haut de son crâne : voilà des passages qui n'avaient pas été creusées par les mains habiles d'un excavateur gnome !

C'est donc dans un souffle d'aise que la Barde déboucha de ce labyrinthe naturel, afin de pouvoir apprécier l'air et l'espace offert par le gigantisme de ce nouveau passage où figurait la suite de leurs épreuves. Constatant qu'elle serait la dernière à reprendre sa taille normale, Myree s'occupa tranquillement, assise dans un coin, occupée à expérimenter les sonorités plus aigues offertes par sa théière rapetissée.

Une fois que son corps eut retrouvé des proportions plus habituelles, la Gnome se joint à ses camarades dans l'étude des stèles, son regard scrutant avec attention ces symboles appartenant à ces langues diverses et variées. Pour une fois depuis le début de cette journée, la Barde semblait révéler un véritable sérieux à leurs entreprises, et sa concentration semblait telle qu'elle ne semblait même pas prêter attention aux lectures en Halfelin énoncées par la Clerc. Son attention était très vite passée sur ces écritures-ci, ainsi que sur les phrases inscrites dans des formes délicates et circulaires figurant sur la quatrième stèle. La gnome semblait buter sur la toute première stèle, comme cherchant à résoudre un problème extrêmement épineux, que Wrenn chassa en une seule remarque. En effet, dès lors que le Trappeur parvint à déchiffrer le gobelin, il sembla libérer la Barde d'une intense réflexion. Myree tilta alors à la demande de Lilci énoncée à son attention, et, passant devant chacune des stèles, tapota du doigt leur surface :

- Gobelin. Halfelin. Pour celle-ci, je l'ignore... Mais la quatrième, je reconnais de l'Elfique.

Sur ces déclarations, Myree s'écarta des pierres gravées, comme pour avoir une vision d'ensemble. Croisant les bras, elle énonça une remarque:

- J'ai l'impression que chacune des traductions n'a ni queue ni tête, et n'ont aucun sens les unes par rapport aux autres. Ou alors, peut-être que ça aura une importance pour plus tard ? Comme des conseils ou des mises en garde d'étapes qui nous attendent pour le rite ? Qui sait, on croisera peut-être un vieux kobold ? A moins que cette stèle parle de la vieille Halvena.

Malgré cette remarque pince-sans-rire, Myree ne quitta pas son chemin de pensée, ses sourcils s'affaissant dans un air d'intense réflexion.

- En tous cas, si je traduis l'ensemble, ça fait : "Méfiez-vous de ce kobold si vieux. Où sont vos manières ? Retirez vite votre bras de la chaise." Là, je sèche. Et ça finit sur cette phrase : "Ce nain fantaisiste adore peindre ses toiles de nombreuses couleurs." Et quelqu'un l'a dit, la cinquième pierre regroupe les quatre langues, et ça donne : "Chacun sait qu'un bébé gnome qui tête fort"... puis il nous manque la fin. Hm... Tu notes bien tout ça dans ton précieux petit carnet, la Taupe ? ... Glimble ?

Quittant enfin du regard l'étrange énigme gravée dans la roche, la Barde constata que le Gnome érudit n'était plus à leurs côtés, mais situé plus loin dans le couloir, affairé à manipuler sa magie devant cet étrange glyphe associé au cercle d'illusions.

- Mais qu'est-ce qu'il fait... ? eut-elle à peine le temps de prononcer, avant que les effets du sort de Glimble ne se révèle aux yeux du groupe.

Les plis invisibles de la Toile se révélèrent à Glimble aussitôt son incantation achevée, confirmant que l’obscure paroi qui leur barrait la route n’était qu’une illusion solidement verrouillée. Mais le glyphe qui en scellait l’accès se dérobait à son analyse : trop mouvant... ou plutôt trop malicieusement tissé ! Halvena avait-elle brouillé les arcanes à dessein pour tromper son apprenti ? Il avait beau plisser l'œil, le cercle magique restait une serrure sans clé apparente.

Wrenn, de son côté, furetait par-ci par-là, son regard exercé traquant la moindre fissure, le moindre relief suspect. Sous ses doigts, il sentit la poussière claire, effritée, qui s’accumulait par endroits au pied des stèles. Les gravures avaient été tracées sur place, il en était certain. Mais au-delà de ce constat, rien ne lui venait...

L'esprit vif de Myree trouvait dans ces phrases alambiquées un défi à sa mesure. Opiniâtre, elle répétait les mots gravés, les roulant sur sa langue comme autant de chants exotiques. Elle avait été confrontée au cours de ses pérégrinations à des langues tordues ou oubliées, et même à des manuscrits lacunaires. Pourtant, chaque tentative la ramenait à la même impasse. Le texte, aussi absurde qu’il fût, était complet. Force était de conclure que l’inachevé n’était pas dans l’inscription, mais ailleurs... La barde fronça les sourcils, agacée de voir son savoir de coutume si bavard rester muet.

Alors Lilci, qui observait la scène en silence, sentit soudain une étincelle jaillir dans son esprit. Ce n’était pas la rigueur des vieux textes saints, tout aussi obscurs, qui se rappelait à sa mémoire, mais le souvenir malicieux des calembours d’Olbern Bannobrand, grand amateur de jeux de mots. Les paroles de Myree... elles avaient sonné de travers, comme un couvercle mal ajusté sur une marmite ! La mélodie paraissait un peu bancale, ou plutôt, les sons semblaient comme décalés.

Lancers...

Glimble Nopelstallen - Dé de vie montée de niveau : 7(d20) +4(deg) +4(Int) = 15 vs DD18 ~ Echec
Wrenn Sagredash - Dé de vie montée de niveau : 16(d20) +4(deg) +2(Sag) +2 (race) +1(forestier) = 25
Myree Dinglestone - Jet de compétence : Linguistique : 3(d20) +0(deg) +4(Int) = 7
Myree Dinglestone - Jet de sagesse : 10(d20) -1(Sag) = 9
Lilci Poêledacier - Jet d'intelligence : 16(d20) +1(Int) = 17
Myree Dinglestone - Jet d'intelligence : 1(d20) +4(Int) = 5
Wrenn Sagredash - Jet d'intelligence : 7(d20) +1(Int) = 8
Glimble Nopelstallen - Jet d'intelligence : 9(d20) +4(Int) = 13

Glimble se renfrognait à mesure qu'il luttait à démêler la magie qui scellait le passage. Décidément, Halvena avait décidé de mettre la barre haut.
Alors qu'il tentait vainement de revenir à la charge de la magie du glyphe, il fut interrompu par Myree.

- Mouii ? Ah, c'est toi, Myree. Tu as un problème de taille de bras ?

Glimble n'était pas mécontent que, une fois n'est pas coutume, un bon mot lui soit venu à l'esprit. Quoique, présentement, l'ironie ne serait pas forcément bien perçue.
Les autres camarades avaient pu déchiffrer les différentes langues. Il était étonné qu'il n'y ait pas d’idiome nain, mais soit.

Les remarques de Lilci sur le "décalage" de la sonorité des traductions plongèrent La Taupe dans de profondes réflexions.

Il s'interrompit, pensif. Un bras de fer mental se déroulait entre chaque moitié de son cerveau, sur la question de dévoiler ou pas autres ce qu'il avait déchiffré. Il ne comprenait pas ce dilemme, cette ambivalence intérieure. Au bout de quelques secondes, il quitta enfin son air particulièrement absorbé et son visage se radoucit.
Il leva alors son œil au regard vif vers les autres :
- Merci, chers camarades. On dirait que nos aînés veulent que nous collaborions.
Nous avons dans cette première caverne cinq stèles.
Les quatre premières sont inscrites des langues de quatre espèces : des gobelins, en premier lieu, puis des halfelins, puis des kobolds et enfin des elfes.

Ne seraient-ce pas des contrepèteries ? Par "Méfiez-vous de ce kobold si vieux ?" Ne voulais-tu pas plutôt dire : "de ce kobold vicieux" ?

Mais je ne trouve pas pour les autres...
Il répéta les autres phrases comme pour les faire sonner.
"Où sont vos manières ? Retirez vite votre bras de la chaise."
"Sa jeune amoureuse aimait beaucoup, avant de le quitter à l’aube, lui laisser le pain chaud."
"Ce nain fantaisiste adore peindre ses toiles de nombreuses couleurs."


Pour finir, la cinquième est dernière stèle comporte une phrase qui elle même comporte des groupes de mots des quatre premières langues.
"Chacun sait qu'un bébé gnome qui tête fort pousse plus vite que les autres."
Elle a du sens, est logique en elle-même.

M'enfin, qu'on bien pu vouloir nous faire faire les anciens ?!

Glimble semblait malgré tout vexé de n'avoir toujours pas trouvé la solution à l'énigme.

L'impatience de Myree n'avait pas tardé à se faire sentir, ses yeux se dressant vers le sommet de la caverne tandis que Glimble débitait ses premières réflexions. La gnome était visiblement lassée d'entendre le dévoreur de livres énoncer les mêmes explications qu'elle avait déjà fournie un instant auparavant. Les voilà déjà en train de tourner en rond, dès la première épreuve !

Mais cette exaspération ne dura qu'un instant, car dès lors que l'apprentie tenancière partagea au reste du groupe cette impression de sonorités "décalées", et que l'apprenti Magicien évoqua le mot "contrepèterie", le visage de Myree s'illumina prestement. L'étude de cas sur la phrase en gobelin sembla aussitôt convaincre la Barde, et sa concentration redoubla lorsque l'intéressé énonça une énième fois la traduction de chacune des phrases, qu'elle répétait doucement pour un elle-même, dans un murmure d'intense réflexion.

Malgré un Magicien renfrogné par l'issue de ce récapitulatif, la jeune Myree, quant à elle, fut saisie d'un regain de motivation.

- C'est ça, c'est exactement de ça dont Lilci parlait : des contrepèteries ! Glimble, t'es un sacré génie ! Je pensais pas que ton gros cerveau de vieille chouette en hibernation nous serait utile aussi vite ! S'exclama-t-elle en tapotant la boîte crânienne de l'intéressé par quelques à coups de phalanges accessoirement douloureux.

Pivotant de nouveau vers les stèles, Myree passa devant chacune d'entre elle, d'une démarche débordant d'énergie, s'apparentant presque à des pas de danses tant la Barde semblait retrouver son élément et son enthousiasme fétiche. D'une voix au rythme soutenu, presque chantant, la Gnome s'appropria enfin les traductions des mystérieuse phrases :

- "Méfiez-vous de ce kobold vicieux". Je pense que t'as totalement correct, la Taupe ! Et c'est entendu, on se méfiera de toi et de ta caboche plein de ruses pour la suite !

Myree cligna de son œil droit sans se départir d'un sourire amical dressé vers le Magicien. Puis la seconde stèle ne se fit pas attendre.

- "Où sont vos manières ? Retirez vite votre chat de la braise !" Encore heureux, personne n'a de chat ici. Quoique je miserais plutôt sur une figure de style pour désigner autre chose que le petit animal poilu !

Un haussement d'épaules précéda une petite vrille menant les pas de la Barde devant la phrase marquée en langue kobold.

- "Sa jeune amoureuse aimait beaucoup, avant de le quitter à l’aube, lui lécher le pinceau". On se passera de commentaires. N'est-ce pas Wrenn ?

Myree ne fut s'empêcher de s'esclaffer en constatant l'embarras suscité par cette remarque sans fondement. Et c'est dans une joie sans limites que la Gnome se posta devant la quatrième stèle, non sans un rire profondément amusé.

- J'avoue que celle-là, c'est ma préférée jusqu'à maintenant ! "Ce nain fantaisiste adore teindre ses poils de nombreuses couleurs." Celle-là, grand-père Tête de Pioche aurait été capable de me la sortir de son temps !

Les ricanements de la Gnome ne semblaient pas trouver de dénouement, y compris devant la toute dernière pierre. C'est à travers des yeux embués de larmes hilares qu'un large sourire amusé termina d'égayer l'expression de Myree.

- On a ici une description de Lilci enfant. "Chacun sait qu'un bébé gnome qui pète fort tousse plus vite que les autres."

Pivotant vers la Clerc à la robe entachée, la Barde étira un rictus emprunt de gausserie.

- Vas-y, tousse pour voir ?

Wrenn écoutait les élucubrations de ses amis d'une oreille, tout en étudiant la salle et les stèles. Il remarqua bientôt la fine poussière au pied des stèles, accumulée en petits monticules irréguliers.

- Je pense que ces stèles ont été gravées sur place, et il y a peu de temps. Comme si ces épreuves étaient nouvellement créées, sur mesure, pour chaque Dorthkhel Svirrik...

Il dut s'interrompre, car Myree sautait littéralement sur place. En parlant de décalage et de contrepèterie, Lilci et Glimble avaient créé l'étincelle qui enflama l'esprit vif de Myree comme une trainée de poudre. Sa bonne humeur était communicative alors quelle déjouait l'un après autre les fameux décalages...

Wrenn se répéta les phrases décryptées :
En gobelin, sur la première stèle : "Méfiez-vous de ce kobold vicieux".
En halfelin, sur la deuxième : "Où sont vos manières, retirez vite votre chat de la braise".
En arcane, sur la troisième : "Sa jeune amoureuse aimait beaucoup, avant de le quitter à l’aube, lui lêcher le pinceau".
En elfique, sur la quatrième : "Ce nain fantaisiste adore teindre ses poils de nombreuses couleurs".
et enfin, en plusieurs langues, sur la cinquième :
"Chacun sait qu'un bébé gnome qui pète fort tousse plus vite que les autres"

- Il s'agit définitivement de nous entraider, et ce, dès la première épreuve ! Nous sommes quatre, est-ce que ça veut dire que nous somme chacun plus particulièrement concernés par une des quatre premières, et de manière commune pour la dernière ? Et autant les premières ont un sens, autant la dernière... Tousser plus vite ? Si le kobold me concerne de part mes aventures à l'extérieur, que Glimble est probablement le seul à pouvoir changer ses poils de couleurs, que le chat pourrait être Miélo, ça veut dire que Myree, il te reste cette histoire de pinceau. Est-ce que tu as quelque chose à nous annoncer ?

Un franc sourire et un clin d'œil accompagnait cette dernière question.


- Glimble, est-ce que l'étude du glyphe dont tu parlais tout à l'heure t'as appris quelque chose ? Nous ne sommes pas beaucoup plus avancé, je ne vois rien qui s'apparente à un kobold, ni à des braises... ni à un pinceau !