Prologue (Idriane) : Inquiétant courrier

- Ah, Silys. Sublime créature du Nord, capable d'enchanter quiconque avec ses pas de danses ou de vendre quoiqu'elle veuille avec un sourire… je l'ai recueillie il y a une quinzaine d'année, alors qu'elle quittait Luskan. La pauvre petite ne s'attendait pas à ce que la cité soit si… difficile. Une introduction malaisée dans le commerce, sans aucun doute.

Elle grignota un biscuit tout en sirotant le café.

- Je l'ai prise en charge, voyant immédiatement son potentiel, et lui ait permis de recevoir les enseignements des danseuses calishites.

Il sembla a Metzli que la vieille femme était sincère lorsqu'elle narra la suite.

- Elle a bien grandi, nous avons travaillé ensemble quelques temps. Mais elle a rencontré cette femme, est tombée follement amoureuse et à troquée une vie ambitieuse contre l'existence d'une mère au foyer. Un potentiel gâché, si vous voulez mon avis, mais je suis heureuse pour elle. Elle est un peu comme une nièce perdue de vue, j'aurais aimé prendre des nouvelles.

Elle posa sa tasse et se leva, lentement.

- Et bien, Dame Arnesen, Thédor, je vais donc vous laisser. N'hésitez pas à m'envoyer un message si toutefois notre heureuse famille finissait par arriver.

Elle sourit un instant, avant de s'en aller. Son majordome la suivit comme une ombre.

De longues minutes de silence passèrent après que Thédor, l'ai raccompagné. On attendu que le bruit des sabots, à l'extérieur, ait cessé. Puis on passa la tête dehors pour vérifier qu'elle était bien partie. Enfin il revint dans le petit salon.

- Pas trop mal… tes amies ont des amies, même si je doute que ce soit vraiment des amies, dangereuses, Metzli, dit Thédor.

Au même moment, un bruit se fit entendre à l'étage et les enfants, poursuivit par Eliza et Daphnis dévalèrent l'escalier. Visiblement ils étaient gardé en silence depuis de longues minutes et des cris commencèrent à emplir la maison alors que les plus jeunes courraient partout.

Lancers...

Metzli Arnesen - Jet de compétence : Psychologie : 8(d20) +0(deg) +0(Sag) +2 (trait) = 10

Metzli avait mentalement pris note de toutes les informations qu'Allegra venait de lui livrer sur Silys. Décidément, au vu de ce qu'elle avait appris chez les Hérauts, La jeune ensorceleuse se dit Sabetha et son épouse formaient un couple curieux qui avait dû surmonter bien des obstacles et des réticences.

C'était ensuite avec soulagement qu'elle avait accueilli le départ de la mystérieuse Allegra. Metzli avait assuré son interlocutrice qu'elle ne manquerait pas de la prévenir si Silys venait en ville et l'avait saluée avec les formules de politesse qui convenaient à la situation.

La vie avait alors repris cours dans la maisonnée et l'ensorcleuse avait immédiatement questionné son père. Encore un peu mal à l'aise, elle parlait à voix basse, bien qu'ils se soient assurés du départ effectif de leur "invitée" :

- Qui était cette femme, papa ? Et que voulait-elle exactement ? Oui, j'ai bien ressenti quelque chose de dangereux et de malveillant en elle... Un "je-ne-sais-quoi" qui était très dérangeant...

La jeune femme frissonna en se souvenant de la tension qui l'habitait lors de la conversation.

- J'espère que je ne m'en suis pas trop mal tirée... ajouta-t-elle en espérant obtenir une marque d'assentiment de son père.

Elle adressa ensuite un sourire à Daphnis et déposa un baiser sur sa joue pour le remercier de s'occuper de leurs hôtes, parfois un peu turbulents, puis elle s'approcha d'Eliza et la fit venir à l'écart.

- Les Hérauts m'ont appris peu et beaucoup. En résumé, Sabetha est issue d'une noble lignée du Cormyr. Sa famille réside à Castel-Chêne, une forteresse assez isolée. Son père, le comte Thoral, jouit d'une certaine aura, tant auprès de sujets qu'auprès de la cour. C'est un personnage important...

Elle marqua une pause avant d'ajouter, tout en faisant une grimace :

- Il semble malheureusement qu'il n'ait pas apprécié que ta maman épouse Silys, entre autres choses, et qu'il l'ait déchue de ses droits, sans qu'elle soit pour autant rayée des rangs de la noblesse cormyrienne.

La jolie amnienne ajouta :

- La famille ne semble pas avoir de relations particulières avec Port-Ponant, si ce n'est l'hostilité latente entre le Cormyr et cette ville. Je ne parviens pas à savoir s'il y existe des liens entre toutes ces informations...

C'est un peu confuse qu'elle conclut :

- Voilà ce que j'ai appris, tu y verras peut-être plus clair que moi...

- Allegra Vilha, au service de Dannihyr pour quelques miettes de pouvoir à Eshpurta. Heureusement, je doute que le conseiller soit directement impliqué dans cette affaire. Allegra aime se donner des airs importants, mais elle n'est guère plus qu'un pion.

Thédor s'était permis d'écouter le rapport que Metzli fit à sa jeune amie. Eliza ne sut que répondre. Elle savait visiblement d'où elle était issue, même si elle parut surprise que sa famille soit encore techniquement de la noblesse. C'est à nouveau le père de Metzli qui prit la parole.

- Et bien, malheureusement, moi je vois un rapport. Le Cormyr n'est pas un moindre acteur dans la lutte que mènent les différents pays et les Seigneurs dans la lutte contre le crime organisé. Je ne connais pas bien Port-Ponant, mais j'ai suffisamment entendu de choses ici pour en savoir au moins une chose : ça fait bien longtemps que les Voleurs cherchent à étendre leur influence vers l'est, pour réduire la puissance du Zhentarim et des organisations plus locales. Ce qui pourrait bien expliquer pourquoi Allegra s'intéresse à tes amies.

- Oui, et Silys… et bien, tu sais, elle est capable de grimper aux murs et elle est imbattable au cache-cache. Oncle Virm disait qu'elle pourrait dévaliser la tour d'Alustriel si elle voulait… ça faisait rire tout le monde mais… finalement…

C'est ce qu'ajouta Eliza avec l'air de quelqu'un qui venait de réaliser une vérité sous ses yeux depuis des années.

¤ Ainsi donc, c'était bien ça... ¤

Metzli soupira en entendant les propos de son père : les Voleurs de l'Ombre pouvaient être liés d'une manière ou d'une autre à leur affaire... et à la visite impromptue d'Allegra. La mention du Zhentarim et des organisations de la pègre de Port-Ponant annonçait une potentielle guerre de territoire qui n'avait rien de réjouissant.

¤ Mais dans quelle affaire es-tu allée te fourrée, Sabetha ? ¤

La jolie ensorceleuse caressa Tzotzil tout en réfléchissant, silencieuse et perplexe. Elle finit par déclarer :

- Tout ceci nous dresse un bien sombre tableau de la situation. Mais avons-nous le moindre début de piste ? Je nous vois mal aller frapper à la porte des Voleurs ou du Zhentarim pour leur demander s'ils ont des informations...

L'idée lui semblait tellement absurde qu'elle esquissa un sourire.

- Peut-être que la meilleure piste serait tout de même d'envoyer quelqu'un à Port-Ponant récolter informations et rumeurs... Peut-être qu'un début de piste pourrait alors se dégager...

La jeune femme laissa sa phrase en suspens pour permettre à Eliza et Thédor d'exprimer leur point de vue sur la question.

- J'irais bien, mais je ne peux pas laisser Lili et Jem tout seul...

Eliza ne mentait pas. Cependant il n'était pas très difficile d'imaginer que la mission pouvait aussi paraître excessivement dangereuse pour une jeune fille, aussi débrouillarde soit elle.

- Et tu ne peux pas vraiment te le permettre dans ton état, ajouta Thédor en regardant sa fille. Je sais que tu ne serais pas la première mère en devenir à partir à l'aventure mais mieux vaudrait éviter.

Il s'arrêta pour réfléchir.

- Je suis sur que nous pouvons trouver quelqu'un. Nous l'enverrons à Teziir, puis il ou elle pourra faire le reste du chemin. Le plus important est de récolter plus d'informations, nous verrons ensuite. Quant à nous, nous pourrons voir à découvrir les vrais plans d'Allegra et voir si nous pouvons y faire quelque chose en restant ici.

Il regarda sa fille, espérant visiblement qu'elle ne se mettrait pas dans la tête de partir elle même vers l'Est.

Une goutte tomba sur la vitre. Puis une seconde, bientôt suivie de milliers d'autres. Un grain s'abattait sur la ville alors que l'orage grondait au loin au dessus de la mer. Un changement de météo peu étonnant dans les environs.

Metzli avait approuvé les propos de son père :

Metzli[Ensorceleuse, humaine, chaotique bonne]

- Ne t'inquiète pas, papa... J'ai promis à Daphnis d'être raisonnable... Et, avant d'aller rendre visite aux Hérauts, j'ai écrit une note à Idriane. Elle ne devrait pas tarder à arriver... L'ensorceleuse se tourna vers Eliza et précisa à son intention : - Idriane est une ensorceleuse, comme moi, et je pense qu'elle acceptera de mener l'enquête pour nous. Elle est arrivée en ville voici un bon mois pour que je lui apprenne à mieux maîtriser ses pouvoirs et nous sommes naturellement devenues amies. Je pense qu'elle pourrait apprécier de voir du pays et de mener une enquête pour une noble cause... et tester ainsi ses nouvelles capacités. Elle marqua une pause avant d'ajouter : - C'est une aasimar. C'est sans doute important que je le précise. Mais elle cultive une discrétion naturelle à propos de ses capacités magiques... Une discrétion qui pourrait être bien utile dans le cadre de cette affaire qui nécessite de la délicatesse... -------------------- Metzli est une belle jeune femme n'a aucun mal à séduire la plupart de ses interlocuteurs. Elle a survécu à de nombreuses aventures et acquis une certaine réputation en Amn et sur la Côte des Epées.

Idriane entra dans la pièce alors même que Metzli terminait sa phrase. La voyant arriver, Daphnis lui avait ouvert la porte avant de rejoindre à nouveau ses jeunes invités. La nouvelle venue portait une élégante tenue, visiblement peu adaptée à un voyage, ainsi qu'une petite harpe accrochée dans son dos. Ses yeux dorés étaient aussi étranges que fascinant, mais sans doute moins pour une tieffeline que pour un humain.

La jeune aasimar dévisagea d'un regard interrogatif la tieffeline, visiblement étonnée de trouver une telle compagnie chez son amie, mais elle ne dit mot à ce sujet et salua poliment l'assemblée. Ce n'est qu'une fois que Metzli et Thedor lui eurent expliqué tout ce qu'ils savaient de l'affaire qu'elle prit la parole :

- Eh bien, voilà une fameuse affaire ! déclara-t-elle. Si Sabetha est aussi courageuse et noble que vous le dites, je ferai tout mon possible pour l'aider...

Idriane le devait bien à la famille Arnesen qui l'avait accueillie avec bienveillance et aidée à progresser dans la maîtrise de son don. Mais, même sans cette dette morale, elle se serait certainement naturellement portée volontaire, étant naturellement tournée vers le Bien et l'altruisme.

- J'imagine que le plus tôt sera le mieux. Je vais immédiarement me préparer pour le départ.

Elle marqua une pause, recoiffa une mèche rebelle et ajouta :

- Cependant, contrairement à vous, je n'ai jamais vu ni Sabetha, ni Silys. Auriez-vous un moyen pour que je puisse les identifier avec certitude... et me faire reconnaître d'elles si je venais à les trouver. Si Port-Ponant est telle que vous me la décrivez, mieux vaut faire preuve de prudence...

Après de longs entretiens avec Metzli, une préparation et une nuit de sommeil, Idriane avait quittée la ville. Il lui était relativement étrange que d'aller à la recherche de quelqu'un à l'autre bout du monde alors qu'elle ne la connaissait pas. Mais Metzli lui avait décrit les deux femmes.

Si elle ne connaissait pas vraiment Silys, Sabetha en était tant amoureuse qu'elle en avait une représentation relativement fidèle pensait elle grâce aux conversations de coin de voyage qu'elles avaient pu avoir. Evidemment, la magicienne la décrivait comme la plus belle femme du monde, et Metzli avait pu se convaincre que malgré l'exagération il ne s'agissait pas que de l'aveuglement de l'amour :

- Elle a des cheveux argentés, oui, oui, comme les elfes. Personnellement, je pense qu'il y a un elfe ou une autre créature magique quelque part dans une ascendance pas trop lointaine. Peut-être un dragon du froid ou quelque chose comme ça, comme elle est née à Dix-Villes. Après tout, j'ai moi même un ancêtre elfe, en cinquième ou sixième position, je crois.

C'est ce que Metzli se souvenait d'une conversation et qu'elle avait rapportée à Idriane. Elle savait aussi que Silys était relativement petite et douée d'une intelligence tranchante, ainsi que d'une agilité peu ordinaire qui en faisait une danseuse hors du commun.

Quant à Sabetha, Metzli lui en avait fait une description plus objective. Grande, rousse, le port relativement altier mais un caractère qui ne transparaissait guère de son extraction social. Une culture étendue comme l'intelligence qui va avec. Et un amour assez peu modéré pour le feu, sa femme et ses enfants. Metzli avait ajouté qu'elle ne portait pas ou peu de maquillage ou de vêtements ostentatoires hormis son alliance et des boucles d'oreilles, la plupart des fois où elle l'avait vu.

Idriane avait pris la route vers l'est. De la façon dont elle l'avait souhaité, elle avait voyagé pendant plusieurs jours, traversant les Pics jusqu'à Nashkel puis empruntant la Piste d'Uldoon. Etonnamment, elle n'avait pas eu de problèmes majeurs sur la route. Elle avait fini par arriver à Iriaebor, où, après une nuit de sommeil, elle avait pu récupérer la route principale jusqu'à Elversult et enfin, Teziir.

C'est là qu'elle se retrouvait désormais. Teziir, enclave cormyrienne extérieure, était, de ce qu'elle en savait, la dernière ville où elle pouvait se sentir en sécurité avant Port-Ponant. Nul besoin d'être une génie pour comprendre qu'il ne serait probablement pas simple de s'intégrer dans une ville criminelle en tant qu'asimaar. Il était probable qu'elle doive chercher le plus d'informations possibles avant de s'attaquer à la fin du voyage et au début de l'aventure. Sabetha était cormyrienne d'origine, noble par ailleurs, peut-être y avait il des informations à prendre ici. Installée au bord de la fenêtre du Grand Magicien, l'auberge où elle avait fait halte situé en face du temple d'Azouth, elle se demandait probablement que faire tout en regardant les passants.

C'était munie de ces maigres indications qu'Idriane avait repris la route pour un nouveau voyage. Juchée sur son fidèle Oriel, elle avait parcouru, lieue après lieue, le long chemin qui l'avait menée toujours plus au nord. Elle avait découvert avec curiosité et émerveillement Nashkel, Iriaebor et Elversult , mais n'avait guère pu s'y attarder. Elle n'y avait rien appris concernant la mission qui lui avait été confiée, pas plus qu'en écoutant les conversations qui animaient les caravanes de voyageurs qu'elle avait parfois accompagnées.

L'aasimar avait finalement atteint Teziir, où elle se sentait relativement à l'aise. Si elle avait retrouvé un semblant de foyer en Amn, cet état était tout aussi prohibitif en matière de magie que ne l'était la Chessenta. Elle avait apprécié le nom de l'auberge qui l'avait accueillie et aurait sans doute pu dévoiler sa condition d'ensorceleuse, mais elle avait préféré conserver sa couverture de barde itinérante. Elle faisait partie d'elle, même si elle ne tromperait sans doute pas un regard aiguisé.

Teziir constituait sans doute l'endroit idéal où collecter des informations sans risquer d'attirer l'attention... ou un coup de poignard dans son dos. Idriane réfléchissait à la démarche à suivre.

¤ Ecouter les racontards de taverne serait peut-être une bonne idée, les rumeurs circulent vite... Mais autant chercher une aiguille dans une botte de foin... A moins peut-être de provoquer les choses sans en avoir l'air. Une chanson ou quelque chose de ce genre... ¤

La jeune femme caressa les cordes de sa harpe, prête à jouer un morceau. Quelques notes s'en échappèrent et s'envolèrent pour se perdre dans la salle principale du "Grand Magicien".

¤ Non ! Peut-être plus tard... Le temple d'Azouth est une meilleure piste à suivre. Si je ne me trompe pas, c'est la divinité de la magie par ici. Il n'est pas impossible qu'ils aient entendu quelque chose sur Sabetha et Silys, après tout elles ont acquis une certaine renommée et Sabetha est Cormyrienne... Je pratique moi-même la magie, je suppose qu'ils ne me feront pas mauvais accueil...¤

L'ensorceleuse alla reposer sa harpe dans sa chambre et prit ses armes avant de sortir de l'auberge et de traverser la rue. D'un pas ferme et décidé, elle franchit la porte du temple et se mit en quête d'un prêtre.

Erratum : je me suis fait avoir par FRW, Teziir n'est pas encore un protectorat cormyrien à cette date. Cela dit, il s'agit toujours d'une rivale de Port-Ponant et un protectorat ne se produit pas ex nihilo.

Azouth était un dieu apprécié, mais pas le plus visité. Après tout, son dogme n'intéressait qu'une frange des plus réduite de la population : les mages. On pouvait y ajouter quelques autres mais guère plus. En conséquence, son clergé était plutôt réduit, comme la taille de ses temples.

Le temple était exactement ce que l'on pouvait s'attendre du Premier Magister : un chaos ordonné peuplé de savants irrationnels. Une fois passé la porte d'entrée, une statue d'Azouth faisait face à la porte, lisant un livre. Au plafond se trouvait une grande fresque verni illustrant Mystra et le Magister dans une longue conversation. Il pouvait paraître étonnant de figurer un autre dieu, mais Mystra était sans conteste la supérieure d'Azouth et rien ne laissait présager autrement dans le culte.

Du reste, la pièce ressemblait à ce que l'on pourrait attendre du bureau d'Elminster. Une grande salle ronde, d'étude, dont les murs étaient percés d'étagères supportant des centaines de rouleaux et de livres. Outre les fenêtres, la lumière provenait non pas de torches - un panonceau indiquait d'ailleurs que le feu était rigoureusement interdit dans le sanctuaire - mais de lanternes éternelles reconnaissables à leur lueur trop froide et trop rouge pour du véritable feu. Un vieux prêtre au crâne aussi chauve qu'était mal entretenu sa barbe (on le reconnaissait à sa tenue blanche et bleue) avait une discussion animée avec un visiteur. On aurait pu s'attendre à un échange concernant la magie mais ce n'était pas le cas :

- Êtes vous vraiment entrain de menacer le prêtre de la Maison du Magister d'expulsion, Carbel ?, disait le vieil homme avec un ton sec qui n'aurait guère servi dans une médiation pacifique.

- Bien sûr que non, cher Jivil, je vous rappelle simplement que trois loyers sont déjà dû et que le Conseil doit s'arranger pour que la contribution de tous - y compris des serviteurs des dieux - servent bien à construire le... bien commun.

Le vieil homme haussa un sourcil.

- Mon cher Carbel, vous savez tout le respect que j'ai pour les maîtres de jure, c'était un mensonge, et pour le Conseil, cela aussi. Si le Conseil considère que notre petit sanctuaire n'est plus utile à la ville, alors le sanctuaire partira. Je songe à prendre ma retraite depuis quelques temps, et, après tout, il suffit de traverser la baie pour trouver un royaume où nous serons correctement accueilli.

- Voyons, Jivil, ce n'est pas ce que...

- Et je suis certain qu'Azala verra d'un très bon œil la disparition du temple du Haut et de ses archives, ça aussi c'était un mensonge. Et un sarcasme. Et une menace.

Idriane ne savait pas qui était Azala, mais visiblement, l'argument avait fait mouche. Dans le silence qui suivit, l'ensorceleuse put presque entendre la pomme de Carbel frapper contre le cartilage de sa gorge.

- Je... suis certain que nous pouvons trouver un recours grâcieux, Jivil. Mais essayer d'être à jour le mois prochain, n'est ce pas.

- Mais bien sûr Carbel, dit le vieux prêtre en posant une main contre le dos de son interlocuteur le dirigeant vers la sortie, sans aucun doute ce sera fait.

Dans un court échanges de fausses platitudes polie, Carbel quitta le temple, laissant Jivil seul. Avant que le prêtre ne se rende compte de sa présence Idriane eut encore le temps d'entendre ceci :

- Foutus mangeurs de merde, jamais foutu un pied dans un fumier mais prétend se battre pour les paysans…

Il se retourna et leva un œil sur l'aasimar (il était assez petit), et eu le sourire typique du vieil homme qui ne se soucie plus beaucoup des convention.

- Ah ! Bonjour ma petite, il la regarda, hum... Main pas assez lisse, pas de cicatrices de papier sur les doigts, il renifla, magie tempêtueuse. Pas de grimoire. Barde ? Ensorceleuse ? J'espère que vous n'êtes pas une marchande de bouquins sur la prétendue naturalité de l'échange marchand. Si c'est le cas, je vous présente le dernier qui a tenté de me refourguer l'une de ses conneries, il pointa le mur sur lequel se trouvait une petite statue représentant un homme. Si vous venez pour un noviciat par contre, je dois avouer qu'il y a bien longtemps que quelqu'un ayant du sang des Paradis n'a pas servi le Créateur des Sorts.

La logorrhée pourrait probablement continuer, il fallait qu'Idriane prenne la parole à un moment ou un autre, et elle doutait que le vieil homme prenne ombrage de voir sa parole coupée.

C'était avec curiosité qu'Idriane avait découvert l'intérieur du temple voué à Azouth, car c'était la première fois qu'elle entrait dans l'un d'entre eux. Elle avait capté avec attention le vif échange entre Carbel et Jivil. Il n'avait aucun rapport avec son affaire, mais il permettait de situer quelque peu le prêtre qui officiait dans le sanctuaire.

¤ Un personnage haut en couleur qui ne manque pas d'aplomb ! Et qui n'a pas sa langue dans sa poche... ¤

L'aasimar fut rassurée de constater que Jivil semblait bien informé de la politique locale et disposer de contacts. Si les noms prononcés ne lui disaient rien, ils semblaient avoir fait mouche. Ce n'était donc pas une sorte d'ermite vivant en reclus auprès de ses parchemins. Les premières paroles qu'il prononça en la voyant lui en apprirent encore davantage.

¤ L'oeil observateur et une bonne capacité de déduction ! ¤

L'ensorceleuse sourit franchement à son interlocuteur qui l'amusait beaucoup. Elle finit par prendre l'initiative en répondant à ses dernières questions :

- La bonne rencontre, maître Jivil. Je vais vous rassurer et vous décevoir à la fois. Je ne suis pas une vendeuse itinérante et je ne cherche pas à vendre, échanger, troquer, louer ou emprunter quoi que ce soit ! Mais je ne suis pas non plus venue pour devenir novice, bien que l'affaire qui m'a guidée jusqu'à vous concerne naturellement la magie...

Elle avait laissé ces mots en suspens pour qu'ils instillent peut-être de la curiosité chez le prêtre.

- Comme vous l'avez deviné, je pratique la magie et je suis en plein apprentissage. On m'a conseillé d'aller me perfectionner auprès d'une magicienne de renom, mais elle semble introuvable depuis quelques temps, quoiqu'elle ait peut-être séjourné dans cette région récemment. Je me suis dit que vous pourriez peut-être m'aider, que vous auriez peut-être entendu prononcer son nom ou une mention de son passage...

La jeune femme avait pudiquement omis de répondre à l'interrogation de Jivil quant à la forme de magie qu'elle pratiquait. Elle n'avait pas envie de dévoiler aussi rapidement sa couverture, mais elle pensait néanmoins que le prêtre observateur n'aurait pas trop de mal à la percer à jour... Lui mentir serait donc contreproductif...

Elle se risqua enfin à prononcer le nom :

- Je cherche Sabetha de Sarrière.

Idriane scruta attentivement la réaction de son interlocuteur.

Au besoin, jet de social pour convaincre Jivil de collaborer et jet de psychologie pour déterminer la sincérité de sa réponse.